Réfléchissez avant d’acheter un vélo à assistance électrique ou une trottinette.

Depuis 2020 (effet confinement ?) je vois autour de moi et parmi mes patients une explosion d’achats de vélos à assistance électrique (VAE). Avec souvent une bonne volonté derrière « comme ça je prendrais moins la voiture ». Génial, ça semble écolo, ça fait faire un peu de sport, que demander de plus ?

En pratique le constat que je fais lors de nos échanges c’est que globalement très peu utilisent vraiment le VAE de cette manière. La majorité continue de prendre sa voiture pour aller au travail, faire les courses et autres trajets du quotidien, et le VAE ne sert que pour des petits trajets de loisirs où l’assistance est totalement dispensable… et justement sur une population qui est déjà très largement en manque d’activité sportive (95% de la population !!! cf la dernière étude de l’ANSES), le VAE a plutôt tendance à diminuer encore la part d’effort physique que de l’augmenter.

J’ai aussi de plus en plus d’ados dans mon cabinet qui vont au collège ou au lycée en trottinette électrique ! Je rappelle que mon cabinet est dans une zone où on peut difficilement faire plus plat en terme de relief. Et si l’ado est dans mon cabinet c’est rarement parce qu’il est trop mince et trop musclé. Et pourtant l’ado en face de moi, qui ne fait déjà que son strict minimum en terme de sport (les heures « imposées » par l’école) me dit sans que ça semble poser problème « c’est moins fatiguant ». Ah c’est sûr que le vélo « normal » où il faut appuyer sur les pédales pour que ça avance ça demande un petit peu plus d’effort… et c’est justement ce dont notre corps a besoin. Après des millions d’années à marcher à longueur de journée pour chercher notre nourriture, nous ne sommes pas faits pour être aussi sédentaires que nous sommes devenus. On le voit bien à tous niveaux, par exemple les douleurs de dos ou de circulation sanguine dus à une position assise ou immobile trop longue.

Un peu moins d’effort, c’est possible ?

Bref, je n’ai rien contre le VAE, qui est un outil formidable s’il permet réellement de rendre faisable une distance difficile à faire à vélo au quotidien (par exemple plus de 10km matin + soir pour une personne en surpoids), s’il permet d’éviter d’arriver totalement trempé de sueur après 500m de dénivelé, s’il permet à une personne avec des problèmes physiques de commencer à se remettre au sport sans risque pour leurs articulations, et simplement si c’est vraiment un outil qu’on utilise au quotidien ou en complément de pas mal d’autres activités physiques, c’est aussi un bon moyen pour un couple de rouler ensemble quand l’un gazouille sur son vélo traditionnel et que l’autre a besoin d’un coup de pouce pour pouvoir suivre… mais attention, c’est aussi un outil contre-productif pour la majorité d’entre-nous qui sommes déjà en manque d’effort. Prendre un VAE pour faire 5 km par semaine c’est juste… très dommage.

Une de mes patientes (qui a tout compris) a justement dès le départ planché sur sa remise en forme :
1/ perdre du poids et se remettre au sport en douceur via l’utilisation du vélo à assistance électrique, parce qu’elle partait de trop loin pour commencer directement par faire ses trajets de travail en vélo classique.
2/ son objectif (et sa fierté) c’était de viser le moment où enfin elle n’aurait plus besoin de l’assistance.

Quand elle a voulu revendre son VAE pour le remplacer par un vélo traditionnel pour poursuivre ses efforts, les gens autour d’elle n’ont pas compris. C’est là que ça me désole. Non le VAE n’est pas un signe extérieur de richesse ou de réussite, ni de « je suis une personne qui pense à la planète », c’est censé être un outil spécifique qui répond à un besoin précis et pour lequel un vélo traditionnel n’est pas adapté.

Concernant la trottinette électrique, où l’effort est proche de zéro (se tenir debout c’est pas exactement un effort physique massif !) en tant que diététicienne, je ne vois pas vraiment les cas où je peux cautionner cet usage. Selon la distance, la marche ou le vélo sont tellement plus bénéfiques pour l’individu. Éventuellement en tant que « taxi » pour un usage ponctuel dans les villes, sur une trottinette de location pourquoi pas, mais sinon je sèche un peu sur les cas réels où c’est une bonne idée (si vous en avez, n’hésitez pas à me le faire savoir dans les commentaires).

Tout ça m’amène à ce paradoxe que je rencontre de plus en plus : d’un côté on essaye de minimiser toute perte de temps et limiter tout effort physique (via l’achat de véhicules chers, peu durables, peu « verts » en réalité)… et de l’autre on va prendre un abonnement à la salle de sport (là encore ça n’est pas gratuit, ni en temps ni en argent) pour « fondre » ou « faire du muscle », voire même des médicaments pour palier certaines maladies causées par ce manque d’activité ! C’est un paradoxe que j’ai du mal à comprendre quand on peut faire tellement plus simple : prendre ses pieds ou son vélo (oui ça prend un peu plus longtemps qu’en voiture) pour emmener ses enfants à l’école, aller au travail (selon la distance bien entendu), aller au marché, … selon l’humeur du jour on peut juste partir un peu plus tôt et prendre son temps (pour ne pas arriver en sueur par exemple) ou au contraire revenir en mode « je lâche toute ma colère de la journée » en écrasant les pédales. Il faut juste avoir conscience des temps nécessaires et intégrer cette activité physique au sein de sa journée.

Et qu’on se le dise, on n’est pas non plus obligé d’aller TOUS les jours en vélo au boulot si ça prend trop de temps, mais commencer par 1 fois par semaine ça peut être un bon début. Même si ça met 1 heure au lieu de 20 minutes. On l’intègre dans son « temps hebdomadaire de sport ». Ça laisse aussi un peu de souplesse (s’il pleut on ira demain) et surtout le simple fait de commencer est le meilleur moyen de se rendre compte que finalement oui c’est plus long, mais ça peut aussi être moins stressant (pas mal d’itinéraires cyclables ou de routes tranquilles par chez nous). Ça permet d’être dans sa petite bulle, de prendre le temps de penser, là où la concentration en voiture est souvent trop forte pour avoir l’esprit réellement disponible.

Réfléchissez avant d’acheter un vélo à assistance électrique ou une trottinette.

Un commentaire sur « Réfléchissez avant d’acheter un vélo à assistance électrique ou une trottinette. »

  1. Je vous rejoins à 200% ! Les vélos électriques bon marché (ceux qu’on voit le plus) sont souvent de mauvais vélos auxquels on a rajouté un moteur et une batterie. Quand la batterie est vide ils sont très lourds et franchement désagréables à utiliser, et quand la batterie sera HS le vélo ira probablement à la benne. On peut difficilement faire moins vert.

    J’ai encore le vélo que mes parents m’ont offert pour mon « certificat d’études » (ça vous indique que je ne suis pas toute jeune), il roule au quotidien, et sur le nord du bassin d’Arcachon je ne vois pas trop pourquoi j’aurai besoin d’une « assistance ».

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